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Séjour au Japon


Il y a maintenant presque deux ans, par le biais d’une offre de la formation continue des Ministres de Suisse, je me suis inscrit au programme ISJP (Interreligious Studies in Japan) du NCC Center à Kyoto, dans l’ancienne capitale millénaire du Japon. J’ai eu le privilège, après trente ans de ministère, de me replonger dans un climat académique au «Centre pour l’Etude des religions japonaises», dépendant du « National Christian Council in Japan » qui regroupe une grande partie des églises protestantes du Japon.
J’avais demandé à pouvoir jouir d’une chambre avec de la tranquillité. Mais, vrai cadeau, le NCC m’avait réservé une villa de sept pièces. Elle me permettra de recevoir de nombreux invités: mes camarades de cours, de nombreux pasteurs et collaborateurs des Eglises japonaises et coréennes, à Noël, ma femme et quatre de nos enfants et, en janvier, un de mes neveux. Lors du semestre académique d’hiver, une vingtaine de professeurs nous ont conduits dans la découverte de l’histoire du Christianisme en Asie et des religions japonaises. Mais j’ai aussi eu l’occasion de faire de nombreuses visites et rencontres, depuis la région sinistrée du Tohoku (Ishinomaki, Onegawa, Fukushima) jusqu’aux lieux chargés de mémoire de Kagoshima et Nagasaki, dans l’île de Kyushu, et Hiroshima où nous passerons en famille un Noël inoubliable avec la rencontre d’une Hibakusha (rescapée de la Bombe A). J’ai aussi pu visiter avec mes collègues et camarades de cours les principaux « Hauts lieux » du Shinto, du Bouddhisme et des Shinshukyo (nouvelles religions japonaises) à Tokyo, Nikko, Kamakura, Ise, Kumano Kodo et Koyasan.
Ma compréhension de Dieu, de la religion, de la foi, de l’Eglise a-t-elle changé, évolué ? Je devais répondre à cette question dans le rapport écrit à l’intention des organisateurs du « sabbatical ». Alors oui ! bien sûr ! Mais je ne dirais pas que ma vie a changé. Elle a plutôt …augmenté! En intensité, en questions, en profondeur, en largeur et en hauteur.
Avec quelques convictions en plus. Celle qui me fait croire que pour exprimer ma foi, j’ai besoin des autres croyants, Chrétiens, oui, mais aussi d’autres religions, et également des non croyants.
Une seconde conviction est qu’un dialogue peut et doit être mené entre personnes animées de certitudes différentes ; au NCC, rompu à l’exercice du dialogue interreligieux depuis plus de six décennies, j’ai appris quelques techniques, mais aussi, et surtout, que cet échange, qui autrefois pouvait être cantonné à des élites, est devenu aujourd’hui une obligation pour ne pas dire une urgence politique. Le dialogue interreligieux est l’affaire de tout le monde. A commencer par  les chrétiens sommés d’unir leurs efforts pour entamer une vraie discussion avec les bouddhistes, les musulmans, les agnostiques et les athées.
Cela dessine pour l’Eglise un front sur lequel elle se doit d’être présente au moins sur trois plans:
  • académique, en développant un dialogue au plus haut niveau entre les différentes traditions religieuses.
  • institutionnel, en multipliant les rencontres entre les différents représentants des religions et de la société laïque.
  • personnel, en permettant aux fidèles «de la base» des différentes traditions de parler de leurs expériences de foi et de découvrir que l’expérience spirituelle de chacun mérite respect et écoute attentive.
Le dialogue interreligieux est souvent vu comme une menace pour la foi dans nos communautés et un affadissement des convictions.  Je suis revenu de mon congé sabbatique convaincu que mené avec rigueur et respect de l’autre, il est une chance pour tous ceux qui s’y exercent et aujourd’hui plus que jamais sans doute, une exigence et un défi. Voilà ce que mon séjour dans le «pays des dieux» continue à approfondir en moi…

  • Marc Horisberger
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Rapport final

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