Présence et Solidarité: Le Japon ce n'est pas un peu loin?
Marc Horisberger : Oui, et un peu fou, je l’admets ! Je suis allé en Inde et en Chine, mais je ne sais rien du Japon. Je vais partir six mois à Kyōto où je partagerai la vie de «L'Eglise unie du Christ au Japon» (Kyōdan). Depuis 1988 le Kyōdan est reconnue par la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS).
La « Mission de Bâle », aujourd’hui « Mission 21 », a reçu le mandat de favoriser des échanges entre nos Eglises. Je serai le premier Suisse romand à en profiter au sein d’un petit groupe, avec une collègue allemande et trois étudiants de moins de 25 ans, un Allemand, un Anglais et une Estonienne, qui profitent de cet échange pour faire valider un semestre à l’étranger.
L'échange est placé sous la responsabilité de la Mission EMS (ça ne s'invente pas!) Evangelische Mission in Solidarität, basée à Stuttgart
La langue du groupe sera l'allemand, celle de l'enseignement l'anglais, et celle de tous les jours le japonais que je commence à apprendre... je suivrai des cours intensifs dès mon arrivée à Kyôto durant les trois premières semaines de septembre.
P&S : Vas-tu occuper un poste au sein d’une paroisse ?
Marc Horisberger : Non ! L’échange consiste en un semestre d’étude dans le centre NCC (Center for the Study of Japanese Religions). Cet institut œcuménique, un peu à l’image de celui de Bossey présenté dans Bonne Nouvelle du mois de mai 2015, accueille des étudiants venus du monde entier pour partager un programme d’étude complété de visites de communautés religieuses japonaises et de temples (il y en a plus de 1200 seulement à Kyōto).
P&S : Que propose le NCC ?
Marc Horisberger : Fondé en 1958, l’institut a tout d’abord axé son travail de recherche sur le christianisme japonais et les religions japonaises. Plus tard vint s’ajouter le dialogue interreligieux avec les représentants de ces religions. Délégué de notre région 10, Riviera-Pays d’Enhaut, au dialogue interreligieux, je suis particulièrement intéressé par ce que signifie pour l’Eglise être une communauté minoritaire, ce qui est le cas des Eglises au Japon depuis toujours. Comment être chrétien en étant ouvert au dialogue avec les nouvelles religions et spiritualités dans un monde moderne qui n’hésite pas non plus à se déclarer non-religieux?
P&S : Qu’attends-tu de ce séjour ?
Marc Horisberger : Une meilleure compréhension du grand défi posé aux chrétiens du 21e siècle: comment faire face à l’émergence d’une multitude de « nouvelles religions » et spiritualités détachées des références aux institutions existantes connues et reconnues depuis des siècles en Europe. Je suis aussi impatient de voir comment s’articulent au Japon les tensions entre la tradition et la modernité, entre les rites les plus archaïques et les avancées des sciences, les traditions ancestrales et la technique.
P&S : Quel lien vois-tu avec ton ministère d’aumônier en EMS ?
Marc Horisberger : L’aumônier en EMS que je suis est particulièrement intéressé par la question du vieillissement de la population des sociétés occidentales. Le Japon est très concerné par cet autre défi du 21e siècle. En effet sa population est une des plus âgées dans le monde. Je me réjouis de voir comment le sujet est abordé plus particulièrement par les chrétiens.
Cette problématique d'une spiritualité qui s'épanouit en dehors du cadre d'une communauté religieuse traditionnelle est identifiée au Japon sous l'appellation de "nouvelles religions".
L'approche de ce phénomène fait partie intégrante de mon projet de recherche. Bien sûr, je me réjouis d’avance de ces découvertes et de pouvoir les partager à mon retour avec tous ceux que ces question passionnent et ils sont aussi nombreux en EMS, croyez-moi!
En effet en Suisse, nos aînés n’échappent pas aux transformations profondes de l'Occident.
Si beaucoup d'entre eux sont encore attachés à la foi chrétienne et à leur Eglise, d’autres toujours plus nombreux, n'ont plus d'attaches avec une communauté religieuse. Les questions spirituelles restent cependant importantes même en dehors d’un contexte religieux précis.