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Prédication prononcée le 9 novembre 2014
La Maison que Dieu construit  

Lecture de l’Evangile selon Saint Jean 2, 13-22  

Comme la Pâque des Juifs approchait, Jésus monta à Jérusalem.  Il trouva installés dans le Temple les marchands de boeufs, de brebis et de colombes, et les changeurs. Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple ainsi que leurs brebis et leurs boeufs ; il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs, et dit aux marchands de colombes: «Enlevez cela d’ici. Ne faites pas de la Maison de mon Père une maison de trafic.» Les disciples se rappelèrent cette parole de l’Ecriture: «le zèle de ta maison me dévore.»  Les Juifs l’interpellèrent: «Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu fais là ?»  Jésus leur répondit: « Détruisez ce Temple, et en trois jours je le relèverai.»  Les Juifs lui répliquèrent : « Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce Temple et toi, en trois jours tu le relèverais !» Mais le Temple dont il parlait, c’était son corps. Aussi, quand il ressuscita d’entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela ; ils crurent aux prophéties de l’Ecriture et à la parole que Jésus avait dite.  

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El Greco (de l'italien, Greco, « Grec ») de son vrai nom Domínikos Theotokópoulos
Heraklion (Crète) 1541 Tolède (Espagne) 1614
Jésus chasse les marchands du Temple (vers 1600)
The National Galery London

     Ce qui nous relie
Chers frères et sœurs, chers amis en Christ, chers amis de la profession de foi musulmane accueillis parmi nous ce matin,   Lorsque je rencontre, comme nous sommes invités à le faire lors de la Semaine des religions, des membres d’autres communautés religieuses, je suis toujours frappé de voir que tant de des choses nous relient :   Ce qui nous relie ? Dieu, bien sûr, ou la foi, la prière, la poésie, l’amour du livre, d’un livre… la Thora ou Bible hébraïque chez les Israélites, la Bible, Ancien et Nouveau Testament que l’on appelle aussi l’Evangile chez les chrétiens, Al Quran, le Coran chez les musulmans.   Trois livres qui nous parlent d’un seul et même sujet au fond : Dieu, Que son saint nom soit béni !   Pourtant lorsque je lis les journaux ou regarde les nouvelles à la télé, je vois aussi à quel point les humains se déchirent autour de la question religieuse…   Emeutes, guerres, actes barbares, haines qui perdurent et jettent les humains les uns contre les autres…   Et cela m’effraie. Et je comprends l’angoisse qui peut monter dans nos sociétés au point de vouloir fermer hermétiquement les frontières et mettre des règles strictes à l’exercice d’une religion.   Les religions véhiculent-elles donc tant de violence ? Sont-elles une menace pour la société, voire pour l’humanité ?  

     La violence de Jésus
Ce matin, le récit de l’Evangile qui nous est proposé semble dans un premier temps aller dans ce sens ! Ce texte proposé à toute l’église en ce dimanche 9 novembre 2014 nous montre un Jésus très différent de l’image que l’on s’en fait d’ordinaire   Jésus fait un fouet, et lui l’homme pacifique, doux et humble de cœur, lui, l’Agneau de Dieu, la colombe de paix, se transforme en lion de Juda, en hache déjà mise à la racine des arbres, en cavalier de l’Apocalypse.   Un Jésus violent !   Remarquez tout de même qu’on ne nous dit pas si le fouet a touché les marchands ou les bêtes et qu’il prend le temps de dire aux marchands de colombes d’emporter eux-mêmes leurs cages hors du Temple. En tous cas personne ne sort blessé – si ce n’est dans son être intérieur – et aucune police ou service d’ordre ne vient l’arrêter (du moins sur le moment, car on le sait… ce ne sera qu’une question de jours…)!  

     Une mise en scène réussie
Car son action a tout d’une mise en scène réussie ! Le geste intervient là où la parole ne peut plus être comprise. Ou vient souligner la Parole que dit le Prophète Jésus :  - « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ! »   L’Evangéliste Jean en rapportant cette scène tout au début de son Evangile, veut nous dire pourquoi Jésus est venu :   Il est venu purifier le Temple… symbole de la religion juive à laquelle il appartient… Il est venue purifier la religion…   Non pas abolir l’ancienne, non pas en créer une nouvelle, mais nous ouvrir à la compréhension de ce qu’est la vraie religion voulue par Dieu :  Comme il le dira plus loin dans l’Evangile … la vraie religion, la vraie adoration, ne tient pas à un lieu, Jérusalem ou Samarie, car Dieu cherche des adorateurs en Esprit.   Il dira à la femme Samaritaine qui lui demande s’il faut adorer à Jérusalem ou à Samarie :   Ni à Jérusalem, ni à Samarie, mais en Esprit et en vérité !   Dieu, s’il est le Dieu des humains, de tous les humains, n’habite pas un lieu fait de pierre et de métaux précieux   Dieu, le Dieu révélé par Jésus n’habite pas un lieu, une terre, un pays… il veut habiter … sa créature !

    La question de l'autorité
C’est ce que nous dit Jésus lorsque dans une deuxième provocation, il lance à ceux qui l’interpellent : Qui t’a donné autorité pour faire cela !   Il ne répond pas à cette question directement, mais il élève le niveau :   « Détruisez ce temple et je le rebâtirai en trois jours ! »   Bien sûr ses adversaires restent scotché au premier étage…   Comment ? a fallu 46 ans pour bâtir cette merveille… et toi tu prétend la bâtir en trois jours… ?   La seule question qui mériterai d’être posée – et c’est bien celle à laquelle tout l’Evangile de Jean nous mène - serait bien plutôt :   Mais qui es-tu pour pouvoir faire une telle prouesse ?   Mais qui es-tu donc Jésus de Nazareth ?     Jean nous donne la réponse :   Le Temple dont il parlait, c’était son corps…   Seulement le temps pour ses auditeurs n’était pas encore venu de le comprendre.   C’est la Résurrection qui donnera sens à cette parole provocatrice du Christ.   Comme si la révélation ne pouvait se faire que lentement dans le cœur des humains…   Comme si la foi était une graine, qui parfois, mettait du temps à germer…   Il y a des choses que je ne peux pas encore comprendre, parce que je suis et reste, même croyant, même fidèle, même pèlerin ou converti, enfermé dans les murs d’un système de croyance, d’une tradition religieuse, de convictions bien ancrées.   Jésus provoque son auditoire, mais il provoque surtout à la foi en un Dieu qui n’est pas enfermé, ni dans un Temple, ni dans une tradition, ni dans un livre…  

    La maison commune que Dieu construit
Un Dieu qui est liberté et source de liberté, un Dieu qui est esprit… cet Esprit dont on ne connaît ni l’origine ni le but…   Cet  Esprit bien mystérieux qui pourtant nous fait vivre et dont on peut entendre la voix…   Cet esprit qui peut entrer jsuq’au plus profond de moi, comme le souffle qui m’anime et me fait vivre…   Jésus nous invite à découvrir que Dieu n’est pas lointain, ni sur une Montagne, ni dans un lieu sacré, mais là au milieu de nous et pour ceux qui s’ouvrent à sa présence jusqu’en eux-mêmes.   Le Temple, n’est plus de pierre, mais de chair,   Le Temple dont Jésus parlait, c’était son corps…   Et devenu invisible à nos yeux après la résurrection et l’Ascension ? … Et bien nous dit l’apôtre … ce Temple c’est vous, la maison que Dieu bâtit…   Avec les brique de ses fidèles traversés par le souffle de son Esprit…   L’apôtre Paul applique cela à la communauté chrétienne…   Mais serait-il opposé à l’idée que ce sont tous les hommes de quelque religions ou foi qui puisse bâtir cette maison… ?   Le véritable Temple que Dieu veut n’est pas fait de pierres, mais d’humains unis par l’esprit dans la foi, l’espérance et l’amour…   Je ne crois pas trahir l’évangile, ni heurter les croyants d’autre religions en disant après Jésus … les vrais adorateurs que cherche Dieu, sont ceux qui l’adorent en esprit et en vérité.   Amen